Anne travaille dans l’événementiel, un domaine qu’elle apprécie mais qu’elle vit mal à cause de la pression vécue avant et pendant chaque événement. Ceux-ci sont planifiés et organisés à l’avance, elle souffre pourtant de constater qu’à chaque fois, elle attend le dernier moment pour se plonger dans leur réalisation. Elle dit se sentir plus efficace sous stress et « s’arrange » pour se mettre dans cette situation. Elle croit au bon stress qui va la délivrer de sa procrastination.
Annonçons-le d’emblée, le seul stress positif est celui qui nous permet de surmonter un danger présent et physique. Le stress n’apporte rien sur le plan cognitif. Pourtant, de nombreux managers évoquent ce mythe du « bon stress » qui augmente la performance. Comme Anne, ils s’arrangent pour créer de l’urgence, car sans elle la motivation n’est pas au rendez-vous.
Des freins inconscients
Ce « bon stress » est la résultante d’une période préalable de stress peu visible mais présente dès le début du mandat. Quand on doit réaliser une tâche qui paraît difficile (ou ennuyeuse), des freins inconscients repoussent le moment de s’y engager. On privilégie d’autres activités et on abat les tâches courantes, bien que l’esprit se porte de plus en plus sur le dossier à réaliser. Un sentiment de culpabilité s’installe vis-à-vis de cette apathie.
Le mécanisme sous-jacent est le suivant. La tâche n’étant pas encore réalisée, l’inconscient doute de sa faisabilité et provoque une réponse de stress. Plus le dossier semble peu contrôlable, imprévisible, nouveau ou impliquant l’égo, plus l’individu est immobilisé (le dossier n’est pas traité) en tension (on pense de plus en plus au dossier, on s’agite sur des petites choses). C’est la 3ème réponse de stress, l’inhibition.
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Quand il apparaît que la tâche doit être réalisée en urgence sous peine de conséquences graves, on cesse toute activité pour s’engager dans le dossier, qu’on termine au dernier moment avec soulagement. Cette satisfaction d’avoir atteint l’objectif est associée au stress : c’est grâce à lui que les ressources sont apparues, pense-t-on. En réalité, la réponse de stress est passée de l’inhibition à l’attaque, ce qui a permis l’engagement.
Ce « bon stress » cache ainsi une longue période de stress, tout autant négative car génératrice de blocages, d’anxiété et de tension nerveuse. Ce schéma « phase d’inhibition suivi de phase d’attaque » peut s’activer sur plusieurs dossiers simultanés. L’organisme est soumis à une succession de phase d’« attaque », alors qu’en arrière-plan il est ralenti par la réponse d’inhibition. La répétition de ces épisodes participe à l’apparition d’un caractère anxieux et d’une baisse de la confiance en ses capacités. Un stress chronique s’installe.
Comment désactiver les doutes
Pour supprimer cet effet inhibiteur et créer un élan vers l’engagement, je propose à Anne un moyen pour désactiver les doutes. Dès réception du mandat, elle répond à certaines questions par écrit : « Ai-je déjà fait ce type de travail ? Ai-je les ressources ? De combien de temps ai-je besoin ? Quels sont mes soutiens en cas de problème ? Ai-je déjà des éléments que je peux utiliser ? Quel est l’enjeu sur mon poste, mon image ? » Par ce procédé, elle montre à son inconscient que la tâche est réalisable, il peut donc desserrer les freins. Cet état des lieux préalable agit subtilement : on s’attelle au dossier en question plus rapidement, sa réalisation est facilitée et la pression des délais disparaît. Anne a constaté une diminution de sa tension au travail, et surtout découvert que ce n’est pas le stress qui lui permet d’atteindre ses objectifs, mais bien ses capacités.
© Denis Inkei